vendredi 27 juin 2014

Toujours plus fort ou lâcher prise?

"Ne souhaitez pas que cela soit plus facile, souhaitez être plus fort." Jim Roth. Appliqué et préconisé dans certaines techniques en développement personnel. Ça sonne pas "toujours plus dur" pour vous? En tout cas, moi, ça ne me fait pas envie. Par contre, l'idée de quelque chose de plus doux pour évoluer... Tout de suite, je me sens mieux...C'est quand même mieux les ronrons, que les coups de griffe, non? Et vaut-il mieux sur-vivre, ou bien vivre?
... Souhaiter être plus fort... C'est genre vas-y, entraîne-toi à prendre des coups pour mieux résister. Une version améliorée du "tendre l'autre joue". On connaît: son inventeur a finit sur une croix...Et avant de se faire clouer, il en a pris plein les gencives.
Suivent des siècles de martyrs extasiés à se faire fouetter, brûler, écorcher, torturer, décapiter... Avec toujours autant de bourreaux pour se porter volontaires.
L'actualité démontre combien le principe n'a toujours pas adoucit les mœurs, ni les rues.

De l'autre côté, direction soleil levant, on nous propose un principe bien moins guerrier: le lâcher prise....

Toujours plus fort, toujours plus dur

Cette logique de "toujours plus fort" ne peut que tout durcir: chacun d'entre nous, notre société par voie de conséquence.

Toujours plus fort: avoir plus d'argent, avoir une confiance illimitée en soi, être le premier en compétition, avoir les meilleures notes, avoir la meilleure réussite sociale, la plus belle femme, la plus belle voiture, le plus gros bateau, la plus belle et la plus grande maison... Même si on est qu'une famille de 4 à en profiter.
En bref, être sur-vivant.

Euuhhh, stop au fond de la classe: on arrête de glousser sur "la plus belle..."

Dans les grandes lignes, je comprends l'idée du "toujours plus fort". Et j'y cède même... Sur-vivre, c'est tentant.
Mais à y regarder de plus près, le "soyons plus fort", c'est quand même dire et admettre que la vie et les autres ne peuvent que porter des coups, toujours plus durs. Qu'il faut donc l'admettre, s'y préparer, se dépasser pour bien sur-vivre et rester le premier. En avançant toujours plus loin dans la réussite et l'affirmation de soi.
Question développement personnel, on peut trouver mieux. En tout cas plus serein non?

Gare aux pieds...

Observation: on n'avance jamais plus loin, sans écraser les pieds de quelqu'un au passage. Principe d'action / réaction, le quelqu'un en question:
  •  soit vous renvoie votre "affirmation de soi" bien concentrée sous forme de baffe en pleine figure, 
  • soit élève quelques chiens de sa chienne qu'il enverra mordre un peu partout, pour ne plus se faire marcher dessus...
On constate aujourd'hui le développement d'une société toujours plus dure, toujours plus individualiste, toujours plus sauvage, basée sur ce fondement du "toujours plus". Pour elle-même, pour l'environnement, pour les individus qui la composent. Je ne sais pas vous, mais moi, j'aime pas ce que je vois!

Bien vivre, ou bien sur-vivre

Plutôt que bien sur-vivre et rester le premier, ne pourrait-on pas toujours "seulement" bien vivre et partager le soleil, en ne prenant pour soi que ce qui est seulement nécessaire à la satisfaction des besoins essentiels: manger, dormir, être logé décemment, aimer et être aimé?
Est-ce que ça ne ferait plus de choses à partager et moins de gens contraints d'entrer dans la violence pour pouvoir simplement vivre? Sans même parler de bien vivre!

Et si on se donnait une autre lumière que "toujours plus" pour notre développement personnel? Bon sang, mais c'est bien sûr. Le lâcher prise...

Toujours plus souple, toujours plus doux

La lâcher prise, c'est rendre les choses plus faciles, pour soi et autour de soi. Et donc réduire les éventualités de prendre ou donner des coups. Logique!
Ne pas confondre toujours plus souple, avec toujours plus mou. Ça, c'est le contre-argument fétiche des adeptes de la religion du "toujours plus".

Toujours plus doux, toujours plus souple: explication.

Elle tient en 2 noms. Gandhi, Nelson Mandella.
Je vous épargne Bouddha, qui pour beaucoup est un pur mythe. Comme notre cher Jésus d'ailleurs. Ou Mahomet. Ou Moïse. Ou John Lennon dans quelques siècles si une immense catastrophe efface tout trace de sa voix, de sa musique, et de son existence.

Non, là, il s'agit de la plus belle démonstration, deux preuves par A+B, du pouvoir du lâcher prise. Pas besoin de bible, de coran, de commandements. Juste constater la puissance du Lâcher prise. En dehors de toute conviction religieuse ou spirituelle: juste les faits.
Lâcher prise avec le pouvoir. Lâcher prise avec le "toujours plus". Lâcher prise avec la Vérité. Lâcher prise avec les envies.

Considérez les incroyables révolutions, les tournants de l'histoire du monde et les changements de société énormes, créés par ces 2 hommes, en l'espace d'une courte vie d'homme public et fédérateur. Contre les souffrances de générations entraînées au soyez "toujours plus fort".
Le résultat est probant. Pas besoin d'expliquer ni démontrer.
Néanmoins, le lâcher prise n'étant pas nécessairement un concept très clair pour tout le monde, allons un peu plus loin dans la réflexion.

Lâcher prise, pour tout dépasser

 Je ne vous le cache pas: le lâcher prise, ça s'apprend. Parfois difficilement. Comme pour tout, certains sont favorisés dès la naissance, et développerons naturellement cette aptitude bénie. Pour d'autres, ce sera plus dur. En passant par des coups. Sauf que la réponse ne sera pas "être plus fort", mais prendre du recul, pour "lâcher prise".

Le lâcher prise consiste à se détacher de ses croyances. Non pas de ne plus croire. Simplement prendre du recul. Un recul qui permet de prendre de la mesure. Qui ouvre la tolérance. Tolérance à se dire que ce qui peut être vrai pour soi, ne l'est pas forcément pour autrui.Voire, n'est même pas dans son "perçu".
En quoi je respecte et je comprends l'autre voie, celle du "toujours plus fort". Mais avec le recul, justement, je m'en éloigne. Pour me rapprocher du lâcher prise.

Prendre du recul sur ses croyances

Croyances: comprenez-le au sens large, très large. Pas au sens strict de la religion. La vie, l'humanité, le végétal, l'animal, la planète ne se réduisent pas aux lois et aux interprétations d'une religion.
Le sens large de "croyances", c'est celui qui amène à faire des choix, en partant de ce qu'on pense être bon pour soi, sa famille, sa culture, son entreprise... Ou en partant de vérités qu'on vous dit être les bonnes: lois sur le monopole des graines par exemple...

Le sens large de "croyances", c'est aussi celui qui interroge sur les déclencheurs d'un acte violent pour soi, commis par autrui.

Notez que parmi les croyances, on peut croire que la belle voiture ou le bateau sont indispensables à notre bonheur. Ça typiquement, c'est une envie, pas un besoin. Et si on n'a pas le moyen de la satisfaire une envie vécue comme un besoin, bonjour les dégâts. Mal-bonheur garanti!

Lâcher prise et prendre du recul, ça prend su sens, pour des choses de tous les jours, de la vie quotidienne et personnelle. Le lâcher prise n'est pas qu'une histoire de grands hommes.

Exemple:
  • 1er temps: "mon mari m'a trompée, menti. C'est un enfoiré, un malhonnête, je ne méritais pas ça...."
  • 2ème temps: "il n'a pas réussi à faire face à nos conflits et nos problèmes de couple, il a des difficultés à communiquer, et ne parvient pas à se remettre en question"
  • 3ème temps: "il souffrait aussi dans notre couple, et était incapable de gérer cette souffrance"
  • 4ème temps: "je déteste ce qu'il est devenu à mes yeux, je déteste ce qu'il m'a fait, je le déteste. Mais je comprends et je sens qu'il a peut-être souffert autant que moi, parce qu'il était prisonnier de nos conflits et de ses difficultés à y faire face, à trouver une solution avec moi."
  • 5ème temps: "Il a peut-être eu peur de faire ce qu'il fallait pour dépasser nos problèmes. Moi aussi je n'ai pas réussi à trouver le moyen, j'ai aussi eu peur."
  • 6ème temps: "Je déteste la porte de sortie qu'il a prise. Je lui en veux toujours. Mais je comprends que ce n'est pas forcément ce qu'il voulait au départ. Et que ce n'est pas moi en particulier qui suis responsable."
  • 7ème temps: "Ce qui n'a pas marché avec lui, je peux le comprendre, et je peux retrouver ma confiance dans mon avenir. Je n'ai plus besoin de sortir mes griffes pour me protéger avant que ça me tombe sur la figure. Ce n'est pas parce que ça c'est passé comme ça avec lui, que ce sera comme ça avec un autre. Et maintenant, je connais les pièges à éviter, les choses à changer chez moi pour les contourner. Je retrouve ma douceur, et mon envie d'établir des liens avec les autres"
  • Conclusion -> Elle devient plus douce pour elle-même, et plus douce pour les autres.
     
Remarquez dans cet exemple, que si elle comprend et change son éclairage, elle ne détestera pas moins ce qui est arrivé. Elle ne devient pas plus molle, et n'acceptera pas forcément qu'on lui refasse le même coup. Mais elle verra venir. En ayant appris comment peut-être éviter que cette situation se reproduise avec un autre.
Elle redevient plus douce, ne serait-ce qu'en admettant que la trahison était une conséquence de peurs non maîtrisées, pas une volonté délibérée de lui faire du tort. L'envie de rendre coup pour coup peut disparaître dans la foulée. Avouez que c'est libérateur, et que ça détend de ne plus avoir à imaginer comment se venger... Je vous le disais: plus doux pour les autres... aussi.

Conséquence de cet exemple de lâcher prise: moins de force dans le contact, moins de peurs, moins de protections. Tout ce qu'il faut pour favoriser la communication, et laisser le temps de la réflexion à ceux auxquels on propose une autre voie que celle qu'ils connaissent.

Du temps aux mots


Il est important de laisser cet espace de temps aux autres. L'idée communiquée à autrui doit être:
  1. entendue
  2. comprise
  3. analysée
  4. pour être: admise / réfutée / tolérée (...ou)
Autant dire que passer son message en force et en violence, avec une exigence et une attente de résultat immédiat, ça peut bloquer l'ascenseur dès l'étage 2. Voire le 1: combien de fois n'avez-vous même pas entendu les mots que quelqu'un hurlait? Dans certaines situations, on n'entend plus que des cris, les mots ne sont même plus captés, même intelligibles. Ils stoppent au seuil du nerf auditif, le cerveau ne les "entend" plus.

C'est seulement après le temps de réflexion nécessaire pour lui, qu'un interlocuteur peut choisir d'adopter une "vérité"... ou pas.
Ainsi ont procédé Nelson Mandela, et Gandhi. Proposer d'autres voies, laisser le temps pour que leur idée fasse leur chemin dans l'esprit des autres.

Au passage, notez que vous ne serez pas nécessairement remis en question dans vos convictions, vos valeurs, vos vérités personnelles. Mais vous pouvez aussi l'être... Savoir aussi lâcher prise là-dessus.

Ici peut-être se pose la question du choix, la question du bien et du mal, la question de ce que nous souhaitons pour nous-même, l'avenir de l'humanité et les nouveaux modèles de sociétés que nous aimerions voir naître.
Nelson et Gandhi, eux, ont réussi à remodeler 2 sociétés, à changer leurs mondes respectifs, grâce à ces principes, et à la grande force du Lâcher prise.

Nous ne sommes pas tous des Mandela ou des Gandhi. Mais nous avons tous le pouvoir d'être plus doux pour nous-mêmes, et d'adoucir le petit espace qui nous entoure directement. Puis de toucher l'espace de quelqu'un d'autre qui fera de même. Etc.
Au fond, les océans ne sont remplis que de gouttes d'eau.

Lien utile: échouer ou réussir, selon Jim Rhon (puisque la chronique démarre sur un de ses principes)

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